lundi 30 juillet 2007

Houellebecq contre le "bougisme"

Un magnifique passage relevé dans "Les particules élémentaires" où Houellebecq critique de manière très pertinente ce que Pierre-André Taguieff a appelé le "bougisme"cad le goût du changement, non finalisé mais pour le changement.Ce changement permanent a pour conséquence principale de faire disparaître toute référence au passé au profit d'un culte du présent ou plutôt de l'immédiateté conformément à l'individualisme démocratique.
"Les enfants, quant à eux, étaient la transmission d'un état, de règles et d'un patrimoine.C'était bien entendu le cas dans les couches féodales, mais aussi chez les commerçants, les paysans, les artisans, dans toutes les classes de la société en fait.Aujourd'hui, tout cela n'existe plus: je suis salarié, je suis locataire, je n'ai rien à transmettre à mon fils.Je n'ai aucun métier à lui apprendre, je ne sais même pas ce qu'il pourra faire plus tard; les règles que j'ai connues ne seront de toute façon plus valables pour lui, il vivra dans un autre univers.Accepter l'idéologie du changement continuel c'est accepter que la vie d'un homme soit strictement réduite à son existence individuelle, et que les générations passées et futures n'aient plus aucune importance à ses yeux.C'est ainsi que nous vivons, et avoir un enfant, aujourd'hui, n'a plus aucun sens pour un homme."

Fofana ou la conjonction de l'assisté et du barbare

L'affaire Halimi n'est pas qu'un simple fait divers mais le révélateur selon moi d'un processus de "décivilisation". Même si le terme est assez fort, je l'assume entièrement. Selon moi, il résulte et se renforce par la conjonction de différents éléments.
Regardons tout d'abord la bande de "copains" qui s'est prêtée à ces atrocités: Youssouf Fofana (le chef du "gang des barbares") , Samir Aït Abdelmalek, Yahia Touré Kaba, Giri Oussivo N'Gazi...Au regard de ces simples noms, apparaît de manière sous-jacente et indiscutable des problèmes d'intégration.Encore ne faut-il pas tomber dans le cliché gauchiste de l'innocence originelle de l'homme qui répond par la violence à une autre violence provenant de la société, des injustices sociales, de l'exclusion...Bref, il ne faut pas tomber dans un procesus de déculpabilisation qui aboutirait à venir justifier la pire des barbaries.
En effet, il y a la conjonction de différents éléments et les problèmes d'intégration n'en sont qu'un parmi tant d'autres.
Le règne absolu de l'immédiateté, de l'argent, de la consommation constitue selon moi un élément structurel primordial qui touche de façon paroxystique les banlieues.En effet, ceux-ci seront d'autant plus insatisfaits(malgré le système d'assistanat qui leur permet de vivre très convenablement...) et auront la haine du système, qu'ils seront imprégnés des valeurs de ce système.Les frustrations seront donc importantes et devront trouver un exutoire(cf la jacquerie dans les banlieues improprement appeler "révolte", ce n'est pas la révolte contre un système mais au contraire la volonté de faire partie de ce système dont l'élément intégratuer n'est plus le travail mais la consommation).
Ce dernier élément se prolonge avec la haine de toute médiation et donc la haine de l'école et de la culture en général.
L'origine de ces français est importante pour expliquer l'antisémitisme qui ressurgit principalement dans les banlieues.Ceci s'explique en partie par l'exportation du conflit israëlo-palestinien en France mais aussi par un ancestral préjugé antisémite, l'identification du juif à l'argent (« les Juifs étaient les rois car ils bouffaient l'argent de l'État et il était noir, il était considéré comme un esclave par l'État » Fofana. ).
Enfin, il faut souligner la gêne du MRAP et de l'extrême-gauche devant cette affaire.En effet, comme le souligne Adrien Barrot, il est plus difficile pour ceux-ci de dénoncer un antisémitisme venant des "dominés", qu'un antisémitisme "caucasien".
Plus généralement, ce crime atroce nous montre une "brutalisation" de la société française qui est malheureusement vouée à prospérer.
Enfin, selon Adrien Barrot,"Ce n'est pas un crime antisémite que nous avons sous les yeux, c'est le nazisme à l'état protozoaire, c'est l'égout dont le nazisme est sorti."
Celui-ci, de manière très pertinente, rapproche l'affaire Halimi à l'affaire Redeker par le fait du même délaissement des victimes.
Réveillons-nous!

vendredi 27 juillet 2007

L'opium des bien-pensants

"L'Europe, pareille à un geôlier qui vous jette en prison et vous glisse dans les mains les clefs de la cellule, apporta au monde à la fois le despotisme et la liberté". Ainsi, Bruckner définit l'histoire de l'Occident comme "l'interminable ajustement de la réalité aux principes, eux-mêmes toujours violés, toujours réaffirmés". Magnifique dialectique qui est d'ailleurs justifiée dans les faits au regard de l'exemplarité (et non la perfection) de l'Europe occidentale en matière de démocratie et de droits de l'homme.
Comment expliquer alors l'avalanche pénitentielle en Europe et surtout en France?
Evidemment, le crime n'est imputé qu'à celui qui s'en est repenti. La loi Taubira en est une parfaite illustration en définissant la seule traite occidentale comme crime contre l'humanité ( avec des analogies à la shoah totalement infondées).
La fascination française pour le conflit israëlo-palestinien, pour son passé colonial et esclavagiste réside dans une vision manichéenne du genre humain: d'un côté l'homme blanc touché par le péché originel, de l'autre le palestinien ou le "tiers mondiste", tous deux représentant en quelque sorte le "mythe du bon sauvage".
Une autre cause réside dans la disqualification de l'idée nationale en Europe rendant ainsi obsolète le concept même d'intégration.Autrement dit, l'"Etat-prestation" a remplacé ce que Renan appelait "un principe spirituel", "un plébiscite de chaque jours", cad une nation ( dsl pour le gros mot).
Par ailleurs, il est intéressant de souligner l'absence dans cette logique victimaire des français originaires de l'ancienne Indochine qui n'a pourtant pas été épargnée par les atrocités de la colonisation.
Même s'il convient de critiquer cette logique de repentance au profit d'une plus grande estime de soi, la prudence reste de rigueur.
"Il est toujours fécond, le ventre qui enfanta la bête immonde."Bertolt Brecht

Mon Dieu, ils ont tué Jaurès!

"Ma France à moi elle parle fort, elle vit à bout de rêves,Elle vit en groupe, parle de bled et déteste les règles,Elle sèche les cours, le plus souvent pour ne rien foutre..."
Rappelons que Ségolène Royal a déclaré sa candidature à la candidature sur une chanson de Diam's. Cette phrase est caractéristique, selon moi, d'une certaine décomposition intellectuelle de la gauche et de la société française dans son ensemble valorisant la pseudo "culture jeune" et le relativisme culturel.Autrement dit, le "tout culturel" a remplacé "la culture des clercs".
En réponse à ceci, une citation pertinente de Finkielkraut tirée de son livre "La défaite de la pensée":"Nous vivons à l'heure des feelings: il n'y a plus ni vérité ni mensonge, ni stéréotype ni invention, ni beauté ni laideur, mais une palette infinie de plaisirs, différents et égaux. La démocratie qui impliquait l'accès de tous à la culture se définit désormais par le droit de chacun à la culture de son choix (ou à nommer culture sa pulsion du moment)."